Production of Olefins and Higher Hydrocarbons by Thermal Coupling of Methane
Production d'oléfines et d'hydrocarbures supérieurs par couplage thermique du méthane
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Institut Français du Pétrole
2
Electricité de France
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Gaz de France
Thermal coupling of methane or methane pyrolysis, which is a possible way for the direct chemical conversion of natural gas, can be used to produce ethylene, acetylene and benzene. But the high stability of methane requires a very high pyrolysis temperature (1200°C). To perform this reaction, IFP decided to build and elecric pilot furnace with an overall capacity of 10 m3/h. The design of this furnace is based on shell-and-tube heat exchanger technology with the use of new materials such as ceramics. This furnace has now been operating for more than one year without any noteworthy incident. First we will describe the technological and parametric study that has now been completed. In conclusion, we will make a short economic assessment of the production of ethylene and acetylene in France.
Résumé
Dans le domaine de la conversion du gaz naturel en hydrocarbures supérieurs, il nous a paru intéressant de reconsidérer la pyrolyse du méthane. Contrairement au couplage oxydant [1, 2], il s'agit d'une réaction très ancienne [3] n'ayant fait l'objet que de travaux épisodiques dans le passé [4, 5]. En effet, compte-tenu de sa réactivité très faible, le méthane doit être porté à très haute température, de l'ordre de 1 200°C, pour produire par couplage thermique principalement de l'éthylène de l'acétylène, du benzène, du coke et de l'hydrogène. Ce qui a gouverné notre démarche et la reprise de travaux sur cette réaction, était l'idée que les nouvelles technologies et spécialement les nouveaux matériaux réfractaires tels que les matériaux céramiques devaient permettre de réaliser de nouveaux designs de réacteurs pour mettre en oeuvre cette réaction. Lors d'une étude paramétrique préliminaire [8], réalisée sur un micro-pilote de faible capacité (50 l/h), nous avons pu obtenir des résultats intéressants, parmi lesquels nous avons sélectionné un bilan matière moyen , qui représente un compromis entre les impératifs chimiques (large dilution par l'hydrogène) et les contraintes économiques (faible dilution afin de ne pas pénaliser les investissements). Avec ce résultat (tableau 1), nous avons pu réaliser une évaluation économique préliminaire favorable qui a permis de commencer le développement de ce procédé, dont l'objectif premier était de reproduire le résultat cibleobtenu sur micro-pilote. Pour réaliser ce développement technologique, nous avons dû répondre à plusieurs questions clés : quelle énergie utiliser ; comment avoir un temps de séjour contrôlé ; comment avoir de bons transferts de chaleur ; quel design imaginer pouvant être extrapolé ; quels matériaux utiliser pour travailler à cette température ? Nous avons décidé d'utiliser l'énergie électrique, avec laquelle il nous semblait plus réaliste d'obtenir une technologie éprouvée, et pour laquelle les rendements thermiques à ce niveau de température avec un chauffage par effet Joule sont quantitatifs. Enfin, l'utilisation de l'électricité permet de réaliser un four parfaitement régulé et de choisir le profil de température le mieux adapté. Nous avons choisi un design de type échangeur tubes - calandre [9] (fig. 1). Les tubes sont des gaines en carbure de silicium, qui est un très bon conducteur thermique, protégeant des résistances électriques haute température également en carbure de silicium. Le gaz naturel, en mélange avec de l'hydrogène, circule entre les tubes. Dans l'espace entre la résistance et la gaine se trouve un gaz de protection pouvant être par exemple de l'azote, de l'hydrogène ou du gaz carbonique. Sur ce principe, nous avons construit une unité pilote et un four pilote électrique d'une capacité totale de 10 m3/h. La photographie de cette installation est donnée sur la figure 2 et le schéma de principe du four pilote électrique sur la figure 3. Ce four consiste en un alignement de 21 éléments chauffants (tube + résistance), qui sont régulés en 5 zones de chauffage (2 fois 6 résistances et 3 fois 3 résistances), permettant de préchauffer les gaz de 450 à 1 200°C et de réaliser la pyrolyse à 1 200°C. Selon les conditions expérimentales (débits, dilution), il est possible de travailler avec 1 à 3 zones à 1 200°C, ce qui permet de faire varier le temps de séjour. La puissance totale est de 12 kW. Le déroulement de l'expérimentation a été le suivant : en mai 1989, le four pilote électrique a été réceptionné et démarré. Jusqu'à la fin de l'année 1989, quelques problèmes technologiques (étanchéités, fiabilité des thermocouples) ont été résolus et une étude purement thermique sur gaz inertes a été réalisée. Depuis janvier 1990, une étude technologique et chimique approfondie de la pyrolyse du méthane sur le four électrique est en cours. Elle consiste à accumuler du temps de fonctionnement tout en réalisant une étude paramétrique portant sur l'influence des paramètres suivants : température, dilution par l'hydrogène, temps de séjour, teneur en C2 du gaz naturel. Le fonctionnement lors de l'expérimentation en pyrolyse suit la séquence suivante : pyrolyse du méthane autour de 1200°C pendant quelques heures ; décokage du four à 1000°C par un mélange air/azote ; mise en attente du four à 1000°C sous gaz inerte (azote) jusqu'à l'essai suivant, le couple d'expérimentation (pyrolyse + décokage) représentant un essai. Une double démonstration technologique et chimique de l'intérêt de la pyrolyse du méthane par cette technologie a pu être apportée lors de cette expérimentation. Concernant la technologie, le bilan de fonctionnement sur 9 mois d'expérimentation en 1990 permet d'indiquer que sans incident notable, le four est resté plus de 6 250 h à 1000°C plus de 375 h à 1200°C pour la réalisation de 100 essais. En ce qui concerne les aspects chimiques, nous avons pu pratiquement reproduire le résultat cible(tableau 2). Les principaux résultats de l'étude paramétrique sont donnés par les figures 5 à 9. Par rapport aux résultats publiés précédemment, on peut remarquer qu'il est possible de travailler avec une dilution plus faible en hydrogène, que le rapport acétylène/éthylène est plus élevé, dépendant très fortement de la température. Concernant le rendement en C2+, il semble que l'on soit proche d'un maximum. Dans l'évaluation économique, nous présentons la possibilité de produire de l'acétylène ou de l'éthylène (après hydrogénation de l'acétylène) sur le territoire français en utilisant le gaz naturel importé et distribué par le réseau de Gaz de France et l'électricité produite en France par Electricité de France. En France, le gaz naturel est d'un coût relativement élevé, lié au prix du pétrole brut, alors que l'électricité a un coût attractif de 13,5 cFF/kWh pour 7200 h par an (utilisation hors heures de pointes). La production d'acétylène comparée avec 3 procédés de production d'acétylène, est envisagée dans une optique de production de chlorure de vinyle monomère, et est en compétition avec le procédé d'oxychloration de l'éthylène. Dans le cas de production d'éthylène, ce procédé est en compétition avec le vapocraquage de naphta. La géométrie des fours de pyrolyse et les bilans matières utilisés sont les mêmes que dans les publications précédentes [11, 13]. le tableau 3 indique les données technico-économiques des procédés de production d'acétylène. Le schéma de procédé utilisé est indiqué sur la figure 10. Le tableau 4 indique les données technico-économiques des procédés de production d'éthylène. L'éthylène est pris à son coût de production par vapocraquage, avec deux hypothèses de prix du propylène. La valorisation de l'hydrogène produit est déterminée par son coût de production par vaporéformage de gaz naturel. Les figures 11a, 11b montrent que la pyrolyse du méthane devient compétitive vis-à-vis de l'oxychloration d'éthylène pour un prix de pétrole brut de l'ordre de 23 à 27 $ par baril, alors que les autres procédés de production d'acétylène ne le sont jamais. Si l'hydrogène ne peut être valorisé chimiquement, le seuil de compétitivité passe à 30 $ par baril. En ce qui concerne la production d'éthylène, les figures 12a, 12b montrent que le procédé de pyrolyse du méthane devient compétitif pour un prix de pétrole brut compris entre 30 et 35 $ par baril. On remarque également qu'une unité de capacité plus faible avec une valorisation complète de l'hydrogène est plus intéressante qu'une unité de forte capacité sans utilisation chimique complète de l'hydrogène. Bien que pour un développement technologique de cet ampleur, de nombreux travaux soient encore nécessaires, les excellents résultats déjà obtenus à l'aide d'une technologie totalement innovatrice devraient permettre au couplage thermique du méthane de répondre à certains challenges futurs des pays industrialisés et de la France en particulier comme l'obtention de bases pétrochimiques non pétrolières, la réponse au besoin futur en hydrogène, le redémarrage d'une chimie fondée sur l'acétylène.
© IFP, 1992